Ôter les chaussures fatiguées
D'avoir trop foulé les temps avants,
Laisser choir les pans émasculés
D'un vêtement trop lourd à porter,
Délacer l'étau de cuir et de terre
Gardien d'une prison de saison,
Empli de sève et d'espoirs
Aux mains du vide confier son être,
Courir a perdre haleine,
Chevaucher les destriers fous
Qui s'elancent, salive au mors
Crinière emmêlée de feuilles
Et sueur sur les flancs brunis,
Ne rien craindre plus que l'ennui
D'un corps qui s'enracine inerte
Dans une terre possessive
De ses déserts verdoyants perdus,
Pour battre avec sourire
Un vent aux visages souriants,
Cravacher la croupe invisible
Pour de la terre se déposséder
Dans une course effrénée,
Tendre les bras vers un ciel
Empli de promesses extatiques,
Toucher du bout des doigts
Le ventre chaud des grues cendrées,
De leurs plumes se faire un collier,
De leurs chants se laisser bercer,
S'envoler sur leurs ailes myrifiques
Pour battre d un coeur identique,
Puissant et vibrant tambour
Resonnant par delà les nuages
Elevant la vie de bas en haut,
Éclabousser tel un peintre
Armé de ses pinceaux de bois frais
L'azur brillant d'éclats de vie
Emeraudes, diamants et rubis,
Disparates morceaux d un tableau
Aux odeurs soutenues de bois rosé
De tourbe et d'herbe tendre
Qui au rythme de la rosée se construit,
Posant placidement ses pieds aguerris,
Inspirer à pleins poumons
Le cristal d'un air encore frais,
Pour laisser se répandre l'ivresse
Dans les rues d'un corps flétri,
Fermer les yeux dans un souffle satisfait,
Se recroqueviller l'instant venu,
Tempérant l'impatience telle une vertu,
Pour au printemps éclore
Tel un bourgeon à son aurore,
Inondant de couleurs immortelles
Le gris d un hiver qui se meurt
Et feule tel un loup qui se retire.
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