h42ansreims (clôturé)
il y a 10 ans
Un article très intéressant publié par la lettre du cadre territorial.
Les grands (et petits) élus comme l'exécutif, personne n'a vraiment de projet pour la décentralisation. Un vide emblématique de la déshérence des politiques publiques à l’heure de l’austérité européenne.
Où va la décentralisation ? Nulle part… Dans le mur… on hésite. Le tableau de la France décentralisée s’est en effet un peu assombri depuis l’époque triomphante où, forts de compétences renforcées, les élus locaux nous affirmaient avec autorité que les régions, les départements, les intercommunalités, les communes (cochez la bonne case) étaient l’avenir de la France. Depuis, le cataclysme de 2008 a fait des dégâts : l’État ploie sous les politiques d’austérité et le poids de sa dette, il est devenu incapable de faire et, c’est plus nouveau, de faire faire. Cette perte de capacité s’est doublée d’une perte de légitimité qui semble, mais espérons que ce n’est que temporaire, clouer le cercueil d’une action publique planifiée. Les collectivités ne vont pas mieux.
La crise les a amenées à rabattre leur superbe : elles passent désormais davantage de temps à trouver de quoi faire des économies qu’à se lancer dans des projets faramineux de « développement du territoire ».
L’exécutif est bien en peine de pondre un projet qui ait du sens : il n’a ni méthode, ni cohérence , ni gouvernance
Il faut dire que les principaux acteurs ne sont pas à la hauteur.
Les élus locaux continuent de ne prêcher que pour leur paroisse. Aucune association d’élus ne semble capable de dépasser la défense de sa petite chapelle pour collaborer à l’émergence d’un ambitieux projet décentralisateur venu « d’en bas ». L’exécutif est également bien en peine de pondre un projet qui ait du sens. Le gouvernement n’a ni méthode (on annonce, puis on consulte, puis on accélère sans tenir compte des consultations, on pond des calendriers ultra-serrés ou au contraire qui vont au-delà de la mandature…), ni cohérence (il y a des chances qu’on aboutisse à un dispositif qui réinstaure plus ou moins le conseiller territorial supprimé il y a moins de deux ans), ni gouvernance (en dépit des titres, ça fait belle lurette qu’il n’y a plus de ministre en charge de la décentralisation). Quel meilleur exemple de ce consternant manque de vision que la phrase du premier Ministre, expliquant au lendemain de la présentation de la nouvelle carte régionale par le président de la République, que « l’essentiel était de réduire le nombre des régions ». Ah bon ? Pas de rendre un meilleur service public ou de réduire la fracture territoriale ?
Sauf à aller droit dans ce/ces murs, il y a urgence à réinventer une démocratie sociale
Au fond, ce « dossier décentralisation » est emblématique de la déshérence des politiques publiques à l’heure de l’austérité européenne. Arc-boutés sur les dogmes libéraux, les dirigeants français et européens sont incapables de définir de nouvelles frontières à l’action publique. Comme si, au lieu de les y obliger, la réduction des déficits les exonérait de cette réflexion. Pourtant, il y a danger, en France et en Europe. Danger pour la démocratie, sous la pression des populismes d’extrême droite. Danger pour les peuples, laissés de plus en plus sans défense devant le libéralisme triomphant. Sauf à aller droit dans ce/ces murs, il y a urgence à réinventer une démocratie sociale.
Nicolas Braemer
Rédacteur en chef, la Lettre du Cadre Territorial
http://www.lettreducadre.fr/9017/ou-va-la-decentralisation-dans-le-mur/?utm_source=newsletter-ldc&utm_medium=email&utm_campaign=newsletter-03-06-2014