Bien qu’il s’en défende parfois, par suite d’une distanciation ayant aussi parfois un côté révolutionnaire d’un consensus qui lui déplait, l’humain a horreur du vide, cette absolue solitude qui si elle est tentante dans une expérience jusqu’au-boutiste d’avec soi-même, n’en présente pas moins que le si difficile de sa contre partie.
C’est que l’humain, comme d’autres espèces animales vis-à-vis d’autres, est un commensal…de lui-même.
Et comme l’animal, il tire de cette proximité, non son repas, mais tant d’autres alimentations dont l’échange verbal par exemple fait partie.
Par cet échange verbal, même si lui, isolé derrière son écran, il fait différemment vivre ses mots, lesquels sans cela, lui paraitraient nus comme dans une salle de spectacle où ils seraient déclamés sans spectateurs.
C’est fou ce que des mots, un simple mot et sans qu’on ose se l’avouer ou l’avouer à d’autres…tous ces mots que l’on commet nous paraîtraient presque morts avant la lettre si on n’envoyait pas la lettre se faire lire par d’autres.
Que ce soient les mots, une façon de bouger, une façon de se poser, tout simplement une façon d’être, parfois ou souvent on la trouverait comme déjà morte si elle n’avait pas eu le regard d’un autre.
C’est un peu comme d’une règle plus générale…si quelque chose existe dans une certaine spécificité de ce qu’elle est, c’est parce que quelqu’un la voit ou…au moins y pense.
Mais aussi, en tentant de communiquer avec d’autres, on se donne parfois comme un semblant de plus de légitimité de l’existence, de son existence.
Bon c’est pas le tout mais tous ces mots que je viens d’accoucher, ne seraient-ils pas trop en nombre pour exprimer ce qui avait été suggéré plus simplement par un autre.
Enfin, j’y viens à mon autocritique, laquelle est une autre façon d’être comme un commensal, le commensal de soi-même mais là c’est plus difficile, la nourriture n’est pas la même. Elle a se goût dérangeant, parfois aussi délicieusement dérangeant lorsqu’on a décidé d’être l’acteur de ses mots qui lorsqu’il les déclament, pour se faire n’a invité qu’un spectateur, si possible critique s’essayant à être impartial, parce que c’est dérangeant souvent mais curieusement jouissif aussi…de s’assoir à côté du banc où l’on est assis (image) et de se regarder dans toute la lumière crue que le projecteur d’une certaine objectivité nous fait plus qu’entrevoir de ce que l’on est.
Et pour repartir sur autre chose d’étrange.
La Solitude…l’être seul, il est parfois étonnamment moins seul – à tout le moins de ses mots – que celui accompagné, car les mots qu’il envoie à loisir de son temps libre et à l’encan de ses envies sur un ou divers forums, sont lus par beaucoup d’autres.
Ainsi, il m’en viendrait presque à m’interroger si du constat de ce fait, celui qui envoie les mots ne se trouve pas ainsi comme pris dans une spirale…des mots, tant de mots, comme autant de contre parties qu’il s’offre comme des êtres pour meubler un monde solitaire, le sien.
Parfois, plus un humain pense, plus il est seul ; alors par divers détours, il faut qu’il –presque/le/dise…des fois qu’un autre entende.
Sacrée solitude ! Une étonnante amante si on y pense. Bien qu’on la fréquente assidûment sans vraiment aller voir ailleurs, elle laisse des temps libres ; temps libres dont elle sait bien qu’ils vont pour partie être employé à chercher autre qu’elle.
Mais elle n’est pas jalouse, ne disant jamais rien.
A se demander si de ce silence – complaisant ou calculé – on en viendrait ainsi à lui trouver chez elle, son charme le plus fou.
Personnellement, au début de sa rencontre elle m’a troublé, agacé, déprimé ; et puis plus tard…miracle, je me suis pris à l’aimer.
J’avais même pensé aller voir le maire de mon village pour nous unir, mais quelque chose dont je saurais bien définir ce que c’est, m’en a empêché.
Une fois alors que j’étais resté longtemps éveillé, jusque fort tard dans la nuit en sa compagnie, elle m’a susurré quelque chose à l’oreille :
Avec ma solitude tu t’offres tellement d’envie d’en changer en regardant ailleurs que finalement tu n’es pas du tout seul de tous ces ailleurs, ne le seraient-ils qu’entraperçus.