Nouveau PER :
Aubaine pour les banquiers, Piège à futur retraités
Par Olivier Conchon
Cher lecteur, chère lectrice,
Le gouvernement tente une nouvelle mise à jour des nombreux dispositifs d’épargne, avec une enveloppe commune pour les produits retraites : le PER (Plan Epargne Retraite).
Un nouveau packaging dans « l’offre» du gouvernement
Ce nouveau nom commun est censé mettre à jour les produits existants jusqu’alors comme l’article 83, le contrat Madelin, le PERP, le PERCO... qui ne sont plus commercialisés depuis octobre 2020.
Avec 3 variantes :
Le PER individuel remplace le PERP et le contrat Madelin. Il est alimenté par des versements volontaires. Cette poche s’adresse à l’ensemble des salariés et indépendants qui souhaitent se constituer une épargne retraite individuelle ;
Le PER collectif (PERCOL). Il est mis en place par l’entreprise et s’adresse à tous ses salariés. Il est alimenté par l’épargne salariale (participation, intéressement, compte épargne temps). Vous pouvez y faire des versements volontaires individuels. L’employeur peut également abonder le PERCOL sans dépasser trois fois les sommes que le salarié y a versé avec une limite de 6581€ ;
Enfin, le dernier pilier est constitué du PER d’entreprise obligatoire (PERCAT). Il remplace très clairement le contrat article 83 et s’adresse par conséquent à tout ou partie des salariés d’une entreprise. C’est l’employeur qui choisit la catégorie de salariés pouvant souscrire (qui n’ont alors pas d’autre choix que d’adhérer). Le PERCAT reçoit les cotisations obligatoires du salarié et celles de l’employeur. Il peut aussi être alimenté par des versements volontaires du salarié, ainsi que par le compte épargne temps.
Dans le détail, le gouvernement a effectué 4 changements par rapport aux produits précédents :
Le transfert d’un PER à un autre est facilité. Vous pouvez transférer facilement un PER sur un autre PER ;
Les contraintes pour les versements sont assouplies. Pour ce qui est du PERCOL ou du PER individuel, il n’y a plus de plafonds de versements volontaires, ce qui n’était pas le cas avec l’ancien PERCO et le contrat Madelin ;
Les conditions strictes de déblocage anticipé de l’épargne sont mises à jour (invalidité, décès du conjoint, achat résidence principale, fin des droits au chômage, surendettement) ;
A la retraite, le PER permet de récupérer son capital en une seule ou en plusieurs fois, alors que seule la sortie en rente viagère était auparavant autorisée sur les anciens produits.
Pour le reste, c’est la même chose que ce que vous connaissiez avant.
Mais attention: je vous incite à être très prudent avec ces PER, au moins pour 4 raisons.
Vous allez voir qu’en réalité, c’est exactement comme si vous placiez vous-même votre argent en actions, avec quelques différences embarrassantes :
Raison n°1 : Des frais exorbitants partout
Pour des placements que vous pourriez faire vous-même, les intermédiaires vous prennent de 0% à 5% de frais sur chaque versement !
Juste en laissant votre argent chez un intermédiaire qui va s’enrichir avec, vous perdez immédiatement 5%... Les gérants jouent à fond sur l&rsquoacité du nouveau produit PER (bien qu’il n’ait pas grand chose de neuf, comme vous l’avez vu).
Les frais potentiels sont donc encore plus élevés que l’assurance-vie, qui est pourtant l’un des produits les plus chers avec ses 0,50% à 2% par versement ;
Mais ce n’est pas tout !
Il y a aussi les frais de gestion énormes, entre 0,6 et 1,5% par an sur votre capital,
Et les frais d’adhésion, les frais d’arbitrage dès que vous changez le type de placement à l’intérieur de votre PER, les frais de transfert si vous faites passer l’argent entre vos produits retraite,
Et si cela ne suffisait pas… des frais variables ajoutés librement à cette liste par votre banquier.
Pour résumer, si vous ne faites rien, vous perdez au départ, puis chaque année des pourcentages colossaux de votre capital.
Dans une période de taux d’intérêt à zéro, les frais élevés sont vraiment la première chose qu’il faut éviter !
Et si vous bougez le petit doigt, vous perdez instantanément jusqu’à plusieurs années de rendement, prélevés sans raison par la banque.
Raison n°2 : Une fiscalité opaque
La fiscalité est le seul avantage théorique du PER. Pourtant, faites bien attention : la déduction des sommes versées du revenu imposable, n’est plus une règle, mais une option.
Cela veut dire que sauf mention expresse à votre gestionnaire, vous ne pouvez pas choisir entre une fiscalité accommodante pendant la durée du PER, ou bien à la sortie du PER ;
Raison n°3 : Des rendements au tapis, inférieurs à l’inflation
Comme pour les autres placements bancaires, les rendements sont devenus totalement insignifiants : à moins de 2%.
Les placements bancaires subissent un terrible effet ciseau.
D’un côté, la baisse des taux d’intérêt en négatif empêche les banques de gagner de l’argent facilement avec les placements “sûrs”, comme les obligations.
D’un autre côté, les frais énormes des banques, eux, ne bougent pas. Pour la plupart, ils ne s’affichent pas sur votre compte, ni ne sont annoncés par votre banquier : ils sont cachés directement dans le calcul des rendements. Avant de vous verser les bénéfices réalisés avec votre argent sur les marchés financiers, la banque en prélève la majeure partie !
Quand les banques arrivent à gagner 10% avec votre argent, elles vous en versent par exemple 4%.
Mais quand elles arrivent à gagner seulement 6%, elles ne vous versent plus que 1%.
Vous comprenez le mécanisme ? En dehors des frais affichés par la banque, cette proportion de frais cachés continue à vous être prélevée quel que soit le contexte. Et vous êtes beaucoup plus perdant dans une période où les rendements sont faibles.
Rendements des PER selon les derniers chiffres communiqués :
rendement PER 2020 des banques
rendement PER 2020 des assureurs
Avec de tels taux de rendement inférieurs à l’inflation, vous perdez du pouvoir d’achat chaque année, et votre niveau de vie baisse.
Raison n°4 : Votre argent est bloqué, et bien bloqué
Vous ne récupérez les montants versés qu’au moment de votre départ en retraite, ou bien à l&rsquocasion de l’achat d’une résidence principale.
Comparé à toutes les autres options disponibles pour placer votre argent, ce placement n’a donc aucune liquidité. Et il ne faut vraiment y placer que l’argent que vous êtes prêt à ne plus jamais voir avant des années.
Notez bien : ce dispositif n’est pas non plus stimulant pour la banque, qui sait que vous ne pouvez pas retirer cet argent quels que soient ses rendements (sauf à imaginer un transfert vers un concurrent, complexe et très coûteux). La banque n’est pas incitée à bien performer sur la durée.
Au final, tout se passe avec le PER comme si votre banquier voulait vous dire :
« On ne veut pas vous faire gagner d’argent, mais on vous propose juste de payer moins d’impôts quand vous serez à la retraite ».
Car il y a très peu de chance que la déduction fiscale à la retraite compense votre manque-à-gagner, une fois que vous aurez coincé de larges sommes d’argent dans un PER.
Un dangereux piège à épargnants de plus : vigilance !
Perdre de l’argent à coup sûr pour ne pas “s’embêter” est la logique rationnelle que vous adoptez en faisant le choix d’un PER aujourd’hui (ou d’abonder votre PER).
Après tout, c’est une logique qui peut s’entendre si vous n’êtes pas adepte de la gestion d’épargne.
Mais attention : elle ne fonctionne que si vous avez un portefeuille actif et diversifié à côté, ou un très gros salaire qui vous rapporte.
Car on parle ici de bloquer à 100% votre argent pour de longues années, quoi qu’il arrive dans votre vie et dans l’économie !
Peut-être vous dites-vous en secret, comme c’était mon cas il y a quelques années, qu’il existe une certaine bienveillance dans la façon dont le gouvernement façonne les produits d’épargne ?
C’est une idée qui pourrait se débattre si l’on parlait de l’épargne des années 1960 ou 1970, qui favorisait la classe moyenne.
Et c’est vrai que parmi tous les produits d’épargne, on pourrait espérer en tant que citoyen une certaine bienveillance dans le PER, qui concerne la retraite de tous les Français.
Mais quand on additionne les caractéristiques de ce nouveau produit, mis au point après de longues discussions entre les lobbys bancaires et le gouvernement, on comprend qu’aucune bienveillance n’est prévue, nulle part.
Au final, ce “nouveau” placement comporte tous les facteurs du piège à épargnant classique :
un placement très “marketé” pour impressionner le grand public, mais au rendement réel négatif (à moins de 2% de rendement, il fait perdre du pouvoir d’achat chaque année) ;
avec des frais très élevés et sur tous les mouvements possibles ;
bloqué pour toute la vie active dans les caisses de la banque ou de l’assurance ;
le tout justifié par un privilège fiscal généreusement offert par l’Etat (mais à qui?), dont rien ne dit qu’il sera encore là dans 5 ans.
Comme l’assurance-vie, le PER ressemble à une aubaine pour les banques et assurances qui leur permet de maintenir plus longtemps leur train de vie de rois.
Bien sûr vous ne trouverez nulle part ailleurs une telle analyse, alors qu’elle est simple et rationnelle.
C’est surement parce que je suis l’un des seuls auteurs financiers à ne rien gagner si vous en achetez ou non, et à ne jamais faire de publicité pour des banques ou des produits financiers.
Je vous déconseille vraiment de vous ruer sur ces produits en apparence simples, et quand vous êtes forcé(e) de le faire, d’avoir tous vos voyants allumés pour éviter les pièges !
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