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A UN CHAT
Non moins furtif que l'aube aventurière,
Non moins silencieux que le miroir,
Tu passes et je pense apercevoir
Sous la lune équivoque une panthère.
Par quelque obscur et souverain décret
Nous te cherchons. Nous voulons, fauve étrange
Plus lointain qu'un couchant ou que le Gange,
Forcer ta solitude et ton secret.
Ton dos veut bien prolonger ma caresse;
Il est écrit dans ton éternité
Que s'accordent à ta frileuse paresse
Ma main et son amour inquiété,
Ton temps échappe à la mesure humaine.
Clos comme un rêve est ton domaine.
JOSE LUIS BORGES
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ODE AU CHAT
Au commencement
les animaux furent imparfaits
longs de queue,
et tristes de tête.
Peu à peu ils évoluèrent
se firent paysage
s’attribuèrent mille choses,
grains de beauté, grâce, vol...
Le chat
seul le chat
quand il apparut
était complet, orgueilleux.
parfaitement fini dès la naissance
marchant seul
et sachant ce qu’il voulait.
L’homme se rêve poisson ou oiseau
le serpent voudrait avoir des ailes
le chien est un lion sans orientation
l’ingénieur désire être poète
la mouche étudie pour devenir hirondelle
le poète médite comment imiter la mouche
mais le chat
lui
ne veut qu’être chat
tout chat est chat
de la moustache à la queue
du frémissement à la souris vivante
du fond de la nuit à ses yeux d’or.
Il n’y a pas d’unité
comme lui
ni lune ni fleur dans sa texture:
il est une chose en soi
comme le soleil ou la topaze
et la ligne élastique de son contour
ferme et subtil
est comme la ligne de proue d’un navire.
Ses yeux jaunes
laissent une fente
où jeter la monnaie de la nuit.
Ô petit empereur
sans univers
conquistador sans patrie
minuscule tigre de salon,
nuptial sultan du ciel
des tuiles érotiques
tu réclames le vent de l’amour
dans l’intempérie
quand tu passes
tu poses quatre pieds délicats
sur le sol
reniflant
te méfiant de tout ce qui est terrestre
car tout est immonde
pour le pied immaculé du chat.
Oh fauve altier de la maison,
arrogant vestige de la nuit
paresseux, gymnaste, étranger
chat
profondissime chat
police secrète de la maison
insigne d’un velours disparu
évidemment
il n’y a aucune énigme
en toi:
peut-être que tu n’es pas mystérieux du tout
qu’on te connaît bien
et que tu appartiens à la caste la moins mystérieuse
peut-être qu’on se croit
maîtres, propriétaires,
oncles de chats,
compagnons, collègues
disciples ou ami
de son chat.
Moi non.
Je ne souscris pas.
Je ne connais pas le chat.
Je sais tout de la vie et de son archipel
la mer et la ville incalculable
la botanique
la luxure des gynécées
le plus et le moins des mathématiques
le monde englouti des volcans
l’écorce irréelle du crocodile
la bonté ignorée du pompier
l’atavisme bleu du sacerdoce
mais je ne peux déchiffrer un chat.
Ma raison glisse sur son indifférence
ses yeux sont en chiffres d’or.
PABLO NERUDA
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De sa fourrure blonde et brune
Sort un parfum si doux, qu'un soir
J'en fus embaumé, pour l'avoir
Caressée une fois, rien qu'une.
C'est l'esprit familier du lieu ;
Il juge, il préside, il inspire
Toutes choses dans son empire ;
Peut-être est-il fée, est-il dieu ?
Quand mes yeux, vers ce chat que j'aime
Tirés comme par un aimant,
Se retournent docilement
Et que je regarde en moi-même,
Je vois avec étonnement
Le feu de ses prunelles pâles,
Clairs fanaux, vivantes opales,
Qui me contemplent fixement.
Baudelaire
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Dans ma cervelle se promène,
Ainsi qu'en son appartement,
Un beau chat, fort, doux et charmant.
Quand il miaule, on l'entend à peine,
Tant son timbre est tendre et discret;
Mais que sa voix s'apaise ou gronde,
Elle est toujours riche et profonde.
C'est là son charme et son secret.
Cette voix, qui perle et qui filtre
Dans mon fonds le plus ténébreux,
Me remplit comme un vers nombreux
Et me réjouit comme un philtre.
Elle endort les plus cruels maux
Et contient toutes les extases;
Pour dire les plus longues phrases,
Elle n'a plus besoin de mots.
Non, il n'est pas d'archet qui morde
Sur mon coeur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu'harmonieux !
Baudelaire, encore
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LES CHATS
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.
Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres;
L'Èrèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.
Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin;
Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
Ètoilent vaguement leurs prunelles mystiques.
Baudelaire, toujours
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"Hautain, libre, mystérieux, voluptueux, babylonien, impersonnel, il est l'éternel compagnon de la supériorité et de l'art - incarnation de la beauté parfaite et frère de la poésie - le chat doucereux, grave, savant et patricien."
H.P. Lovecraft (1890-1937 )
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Le petit chat
C'est un petit chat noir, effronté comme un page.
Je le laisse jouer sur ma table, souvent.
Quelquefois il s'assied sans faire de tapage;
On dirait un joli presse-papier vivant.
Rien de lui, pas un poil de sa toison ne bouge.
Longtemps, il reste là, noir sur un feuillet blanc,
A ces matous, tirant leur langue de drap rouge,
Qu'on fait pour essuyer les plumes, ressemblant.
Quand il s'amuse, il est extrêmement comique,
Pataud et gracieux, tel un ourson drôlet.
Souvent je m'accroupis pour suivre sa mimique
Quand on met devant lui la soucoupe de lait.
Tout d'abord de son nez délicat il le flaire,
Le frôle; puis, à coups de langue très petits,
Il le lampe; et dès lors il est à son affaire;
Et l'on entend, pendant qu'il boit, un clapotis.
Il boit, bougeant la queue et sans faire une pause,
Et ne relève enfin son joli museau plat
Que lorsqu'il a passé sa langue rêche et rose
Partout, bien proprement débarbouillé le plat.
Alors, il se pourlèche un moment les moustaches,
Avec l'air étonné d'avoir déjà fini;
Et, comme il s'aperçoit qu'il s'est fait quelques taches,
Il relustre avec soin son pelage terni.
Ses yeux jaunes et bleus sont comme deux agates;
Il les ferme àemi, parfois, en reniflant,
Se renverse, ayant pris son museau dans ses pattes,
Avec des airs de tigre étendu sur le flanc.
Mais le voilà qui sort de cette nonchalance,
Et, faisant le gros dos, il a l'air d'un manchon;
Alors pour l'intriguer un peu, je lui balance,
Au bout d'une ficelle invisible un bouchon.
Il fuit en galopant et la mine effrayée,
Puis revient au bouchon, le regarde, et d'abord
Tient suspendue en l'air sa patte repliée,
Puis l'abat, et saisit le bouchon et le mord.
Je tire la ficelle, alors, sans qu'il le voie;
Et le bouchon s'éloigne, et le chat noir le suit,
Faisant des ronds avec sa patte qu'il envoie,
Puis saute de côté, puis revient, puis refuit.
Mais dès que je lui dis: "Il faut que je travaille;
Venez vous asseoir là, sans faire le méchant!"
Il s'assied ... Et j'entends, pendant que j'écrivaille,
Le petit bruit mouillé qu'il fait en se léchant.
Edmond Rostand
extrait de Les Musardises
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LES ESCLAVES
Au commencement, Dieu créa le chat à son image.
Et bien entendu, il trouva que c'était bien.
Et c'était bien d'ailleurs.
Mais le chat était paresseux.
Il ne voulait rien faire.
Alors, plus tard, après quelques millénaires, Dieu créa l'homme.
Uniquement dans le but de servir le chat,
De lui servir d'esclave jusqu'à la fin des temps.
Au chat, il avait donné l'indolence et la lucidité;
À l'homme, il donna la névrose, le don du bricolage et la passion du travail.
L'homme s'en donna à cœur joie.
Au cours des siècles, il édifia toute une civilisation basée sur l'invention,
La production et la consommation intensive.
Civilisation qui n'avait en réalité qu'un seul but secret:
Offrir au chat le confort, le gîte et le couvert.
Jacques Sternberg
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Le Duo des Chats, de Rossini
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Hemingway aussi avait écrit sur les chats, c'était un très grand ailurophile
Modifié il y a 8 ans, le jeudi 21 avril 2016 à 13:29
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Un village écoute désolé
Le chant d’un oiseau blessé
C’est le seul oiseau du village
Et c’est le seul chat du village
Qui l’a à moitié dévoré
Et l’oiseau cesse de chanter
Le chat cesse de ronronner
Le chat et l’oiseau
Et de se lécher le museau
Et le village fait à l’oiseau
De merveilleuses funérailles
Et le chat qui est invité
Marche derrière le petit cercueil de paille
Où l’oiseau mort est allongé
Porté par une petite fille
Qui n’arrête pas de pleurer.
Si j’avais su que cela te fasse tant de peine
Lui dit le chat
Je l’aurai mangé tout entier
Et puis je t’aurai raconté
Que je l’avais vu s’envoler
S’envoler jusqu’au bout du monde
Là-bas c’est tellement loin
Que jamais on n’en revient
Tu aurais eu moins de chagrin
Simplement de la tristesse et des regrets.
Il ne faut jamais faire les choses à moitié.
Jacques PREVERT
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Citation de "othelo"Hemingway aussi avait écrit sur les chats, c'était un très grand ailurophile
Le chat est d'une honnêteté absolue
l'homme pour une raison ou une autre cache ses sentiments
le chat non
Ernest Hemingway
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