Les risques internationaux s’accentuent ; la croissance française résistePoint de conjoncture - octobre 2019
Julien Pouget et Frédéric Tallet
« L’environnement économique international se dégrade, sous la conjonction de plusieurs facteurs : tensions protectionnistes, incertitudes autour du Brexit, interrogations sur l’orientation des politiques économiques dans certains pays, etc. Les prévisions de croissance sont donc revues à la baisse pour la plupart des partenaires économiques de la France.
La prévision pour la France est en revanche quasi inchangée par rapport à la Note de conjoncture de juin dernier (croissance prévue de +0,3 % par trimestre d’ici la fin de l’année, et de +1,3 % en moyenne annuelle en 2019). Cette résistance tient surtout à la demande intérieure. En particulier, la consommation certes n’accélère pas, mais progresse tout de même à un rythme régulier, alors que le pouvoir d’achat et l’emploi sont dynamiques. »
« Résumé »
« Le premier semestre 2019 a été marqué par une dégradation assez nette de l’environnement économique international, sous la conjonction de plusieurs facteurs.
Au-delà du fait que certaines grandes économies avancées sont quasiment au plein emploi, ce qui limite leurs possibilités de croissance, les tensions protectionnistes se concrétisent progressivement, faisant fléchir le commerce mondial.
En particulier, la Chine et l’Allemagne ont vu leur activité nettement ralentir, sans qu’il soit possible à ce stade de distinguer précisément ce qui relève de raisons conjoncturelles ou de causes plus structurelles. À l’impact direct de l’escalade des droits de douane s’ajoutent les incertitudes sur l’issue des négociations commerciales. Ces incertitudes se cumulent avec les interrogations sur le Brexit mais aussi sur l’orientation des politiques économiques en Italie, en Espagne, en Allemagne ou aux États-Unis, et peuvent générer de l’attentisme, notamment en matière d’investissement des entreprises.
Dans ce contexte, les politiques monétaires sont à nouveau très accommodantes mais leur marge de manœuvre est réduite. Les politiques budgétaires soutiennent quant à elles – certes à des degrés divers – la demande intérieure dans nombre d’économies avancées. Les climats des affaires sont d’ailleurs actuellement plus favorables dans les secteurs « abrités » (services, construction, commerce) que dans l’industrie. Malgré ces soutiens, les prévisions de croissance d’ici la fin de l’année 2019 sont revues à la baisse pour la plupart des partenaires économiques de la France. En particulier, l’activité économique resterait atone en Allemagne et en Italie. Le PIB de la zone euro progresserait de 0,2 % au troisième comme au quatrième trimestre, et de 1,2 % en moyenne annuelle en 2019 (après +1,9 % en 2018).
En revanche, le scénario macroéconomique pour la France est quasiment inchangé par rapport à la Note de conjoncture de juin (avec une croissance prévue de +0,3 % chaque trimestre d’ici la fin de l’année, et de +1,3 % en moyenne annuelle en 2019 après +1,7 % en 2018). Cette résistance tient surtout à la demande intérieure : l’investissement des entreprises bénéficie comme dans d’autres pays de conditions favorables, notamment les taux d’intérêt bas, tandis que celui des administrations publiques est dopé par le cycle municipal ; la consommation privée profite quant à elle – certes graduellement, compte tenu d’un taux d’épargne encore élevé – du retour de la confiance des ménages en lien avec la vigueur du pouvoir d’achat (+2,3 % prévu en 2019).
Au-delà des mesures de soutien budgétaire, cette vigueur reflète aussi celle de l’emploi (plus de 250 000 créations nettes d’emploi prévues sur l’année 2019) : le taux de chômage poursuivrait donc sa baisse de l’ordre de 0,1 point par trimestre et s’établirait à 8,3 % en fin d’année.
Les aléas internationaux susceptibles d’affecter – surtout à la baisse – ce scénario sont nombreux. Pour l’instant, le commerce extérieur français n’apparaît pas trop affecté par les tensions protectionnistes et les exportations seraient portées, en fin d’année, par d’importantes livraisons aéronautiques et navales. Mais il pourrait l’être davantage si, par exemple, la demande intérieure allemande venait à faiblir. En outre, notre scénario est établi sous l’hypothèse conventionnelle d’un Brexit « ordonné ». Il est difficile à ce stade de quantifier l’effet à court terme d’un éventuel Brexit sans accord au 31 octobre, compte tenu notamment des perturbations que cela risquerait de causer sur les chaînes d’approvisionnement de certaines entreprises. »
« Le commerce européen navigue entre deux risques majeurs »
Les anticipations de Brexit provoquent des àoups dans les flux commerciaux
« Les perturbations associées au Brexit ont été la première source de fluctuation des échanges commerciaux au premier semestre 2019 : après des importations et un stockage britanniques massifs au premier trimestre, le mouvement inverse, chute des importations et déstockage, a été tout aussi brutal au deuxième trimestre. En contrepartie, les échanges des partenaires européens du Royaume-Uni ont connu des variations notables mais d’ampleur plus modérée. »
Les échanges mondiaux subissent les chocs protectionnistes successifs
« À cela se sont ajoutées les incidences de l’escalade protectionniste poursuivie tambour battant par les États-Unis. Outre l’effet direct sur leurs flux bilatéraux avec la Chine, ces tensions ont contribué plus généralement à ralentir les échanges mondiaux depuis plusieurs trimestres. Ainsi, le commerce mondial a stagné au premier semestre 2019 (–0,1 % au deuxième trimestre après +0,2 % au premier). Sur l’ensemble de l’année 2019, le commerce mondial croîtrait trois fois moins vite que l’an passé (+1,4 % après +4,5 %), sapé par les hausses de droits de douane et le ralentissement économique en cours. Le produit intérieur brut (PIB) des économies avancées ne croîtrait que de +1,7 % en 2019 après +2,3 % en 2018. »
« L’activité française résiste un peu mieux que celle de ses principaux voisins »
La croissance en Allemagne et en Italie est plus morose qu’en France et a fortiori en Espagne
« Ces chocs internationaux ont davantage pesé sur l’activité économique en Allemagne qu’en France. La croissance outre-Rhin a en effet stagné au printemps (–0,1 % après +0,4 %), l’industrie ayant été nettement plus affectée que les services par l’affaiblissement des échanges internationaux et le ralentissement de l’investissement des entreprises. Alors que le PIB espagnol a gardé une progression soutenue (+0,4 % après +0,5 % au premier trimestre), la croissance économique italienne reste quasi nulle depuis plus d’un an (0,0 % au deuxième trimestre après +0,1 % au premier). En France, l’activité économique a continué de croître de 0,3 % par trimestre (au deuxième comme au premier trimestre et peu ou prou depuis un an). La production a été plus allante dans les services marchands (+0,7 % après +0,5 % au premier trimestre) ou la construction (+0,5 % après +0,7 %) que dans l’industrie manufacturière (–0,4 % après +0,5 %). »
« La politique monétaire toujours plus accommodante conduit les taux longs plus loin en territoire négatif »
La Fed et la BCE baissent leurs taux directeurs
« Alors que la Réserve fédérale (Fed) a abaissé d’un quart de point les taux directeurs américains en juillet puis à nouveau en septembre, la Banque centrale européenne (BCE) a accentué sa politique monétaire très accommodante en septembre, via notamment un abaissement du taux de dépôt et la reprise de ses achats obligataires à partir de novembre 2019 pour 20 milliards d’euros par mois. En conséquence, les taux souverains de la zone euro se sont établis en territoire négatif (depuis le printemps pour le taux allemand à 10 ans et depuis l’été pour le taux français). Cette diminution des taux européens, associée à une croissance moins vive qu’outre-Atlantique, a contribué à affaiblir le taux de change de l’euro face au dollar. Il a ainsi atteint 1,10 $ en septembre (taux retenu par hypothèse au dernier trimestre 2019). Dans le contexte de ralentissement économique mondial, le prix du baril de Brent est redescendu en deçà de 60 $ durant l’été avant de rebondir au-delà de 65 $ mi-septembre, à la suite d’attaques contre des équipements pétroliers saoudiens. »
« Au–delà des chocs ponctuels, le ralentissement des échanges concerne l’ensemble des principales économies »
La plupart des grandes économies ralentissent en 2019
« Aux États-Unis, l’activité économique ralentirait en 2019 (+2,3 % après +2,9 % en 2018) sous l’effet d’une contribution de nouveau négative du commerce extérieur (–0,3 point) ; les effets des relances fiscales de 2018 s’estompent, ce qui conduit à un ralentissement de la consommation des ménages (+2,6 % après +3,0 %) et de l’investissement privé (+1,2 % après +4,6 %).
En Chine, les indicateurs d’activité signalent de nouveau une décélération et les exportations freineraient nettement par rapport à l’an passé (+2,0 % après +6,6 %). Le ralentissement affecte d’autres grandes économies : la production industrielle est en berne au Brésil, la hausse de TVA en Russie a pénalisé la consommation, la Turquie n’est pas encore complètement sortie de crise et l’Argentine y demeure, les pays d’Europe centrale et orientale subissent la baisse de régime de leurs partenaires européens. Enfin, l’activité au Japon serait chahutée au second semestre 2019 par le relèvement de deux points de la taxe à la consommation en octobre. »
« Le Brexit demeure l’inconnue majeure en Europe »
Le climat conjoncturel allemand continue de se dégrader
« Alors que le moral des industriels s’établit à des niveaux favorables en Espagne et en France, il est nettement plus dégradé en Italie et surtout en Allemagne (graphique 1). Du fait d’une production industrielle particulièrement affectée mais aussi d’une confiance des consommateurs en repli, la croissance allemande ne dépasserait pas +0,1 % par trimestre d’ici la fin de l’année. La croissance italienne serait également en berne (+0,1 % par trimestre), tandis que l’économie espagnole conserverait son dynamisme (+0,6 % par trimestre).
La vigueur des gains de pouvoir d’achat en Allemagne, comme chez ses grands partenaires de la zone euro, ne serait pas suffisante pour compenser la morosité du climat industriel. »
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4222186
Alors Fouthese !
T'es pas heureux d'apprendre que malgré les problèmes la France s'en sort plutôt bien ?
Mais quelque chose me dit que tu vas encore trouver les excuses d'un complot gouvernemental et européen pour nous affirmer le contraire ! CQFD
Modifié il y a 5 ans, le jeudi 3 octobre 2019 à 20:27